Les pays avancés seraient-ils condamnés à la croissance faible? Faut-il donner raison à l’économiste Robert Gordon qui prédit que nous serions entrés dans une phase de stagnation séculaire? Pour en parler, Xerfi Canal a reçu Christian Chavagneux, économiste et éditorialiste à Alternatives Economiques.
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La deuxième révolution industrielle a fait bien plus que modifier la productivité. Elle a profondément transformé l’existence des Américains, des Européens et, plus tard, des Japonais. Beaucoup de ces changements ne se reproduiront pas. La vitesse de déplacement est passée de celle du cheval à celle de l’avion à réaction. Et puis, il y a environ cinquante ans, elle a cessé de progresser. L’urbanisation, à présent qu’elle a eu lieu, ne se reproduira pas. Il en va de même pour la baisse spectaculaire de la mortalité infantile et la multiplication par trois de l’espérance de vie. La libération des femmes du fardeau des tâches ménagères est également définitive.
http://www.lemonde.fr/economie/article/2012/10/08/adieu-a-la-croissance-illimitee_1771954_3234.html
Sur le même sujet, interview de Daniel Cohen, directeur du département d’économie de l’Ecole normale supérieure et du Cepremap (Centre pour la recherche économique et ses applications):
Pour reprendre le débat d’aujourd’hui, on a deux camps qui s’affrontent violemment chez les économistes. Il y a ceux qui disent qu’on est en plein dans une nouvelle révolution industrielle, dont le potentiel est explosif. J’assume, j’adhère à ce point de vue : nous vivons une troisième révolution industrielle. Et puis il y a ceux, tel l’économiste Robert Gordon qui disent : le numérique ne change pas grand-chose. Internet c’est un peu comme le mariage du téléphone et de la télévision. Le progrès technique, c’est fini : à preuve la croissance ne cesse de décliner. Quand on dit ça, on passe évidemment à côté de la formidable transformation du monde. Mais le constat sur le ralentissement de la croissance, au moins pour la classe moyenne, est lui indiscutable. Ma conviction aujourd’hui, c’est que, oui, nous vivons une révolution industrielle, mais que son potentiel de traction de l’ensemble de la société est faible, à la différence de la précédente révolution industrielle. On assiste à ce que j’appelle une révolution industrielle sans croissance. Hier, le progrès technique tirait l’ensemble de la société, aujourd’hui le numérique est vécu comme une menace. Selon une étude qui fait autorité, 50 % des emplois sont menacés de numérisation. Ceux qui s’en sortent se trouvent soit tout en haut de l’échelle sociale, soit tout en bas. C’est la classe moyenne, dans les banques, les assurances, les administrations qui est menacée. […] Elle est née de l’expansion des services qui s’est produite dans le sillage de la révolution industrielle, dans les banques, les assurances, les agences de voyage… C’est l’ensemble de cette superstructure, de cette bureaucratie qui est menacée dans les vingt ans à venir par le monde des big data.[…]